Modes d’emploi pour faire la différence

Leurs performances décevantes ont mis les gérants actifs sur la sellette. Beaucoup se voient reprocher de n’avoir d’actifs que le nom. Le temps est-il venu de devenir “hyperactif” ?
Un nombre sans cesse croissant d’investisseurs privilégie les produits indiciels, tout particulièrement sur les grands marchés efficients. Si la tendance continue, que restera-t-il aux gérants actifs? Pour faire revenir leurs clients, abaisser les frais ne suffira pas. De ce point de vue, la gestion passive évolue d’ailleurs déjà dans une tout autre catégorie.
Dès lors, la solution n’est-elle pas de changer radicalement d’approche – par exemple en devenant “hyper actifs”? BANCO s’est tourné vers quatre experts pour savoir si la gestion active est vouée à suivre cette tendance pour se démarquer véritablement.
A cette idée, aucun ne déborde d’enthousiasme. L’heure est plutôt à défendre les valeurs fondamentales de la gestion active. Ils rappellent que les gérants de conviction ont un rôle essentiel à jouer pour des pans entiers de l’économie qui ne bénéficient pas du boom de la gestion indicielle. Ils ne perdront donc pas leur terrain de jeu.
Mais encore faut-il savoir comment l’occuper à l’avenir. Agilité, adaptabilité et cohérence semblent être les maîtres-mots pour nos interlocuteurs, qui ne plaident pas pour une révolution. L’heure est à serrer les dents, voire à profiter d’un environnement de marché qui pourrait redevenir favorable aux gérants actifs. Jusqu’à ce que les temps changent à nouveau.

Marc Renaud CEO - Mandarine Gestion
Les fonds indiciels diminuent les risques de mauvaises surprises et font baisser les coûts. Cependant, ils ne contribuent pas à un financement efficace de l’économie, puisqu’ils sont par définition non discriminants et concentrent à la fois les flux, la recherche et l’intérêt des investisseurs sur un petit nombre de titres. C’est là que la gestion active devient utile. En effet, elle est à même de remplir – elle – un rôle non seulement financier, mais également économique. Selon son style et le savoir-faire revendiqué du gérant, la gestion active doit donc se porter sur des petites valeurs peu liquides, sur des titres mal aimés et très décotés, ou sur de une hyper-croissance potentielle sans être encore certaine. Ça tombe bien, c’est précisément là que la gestion active peut faire la différence (et justifier ses frais)! Elle prend certes des risques, mais elle sert ainsi l’économie réelle en dégageant de la performance. Il y a bel et bien de la place pour une gestion “vraiment” active.
→ La gestion active est à même de remplir – elle – un rôle non seulement financier, mais également économique.

Ian Heslop Gestionnaire du Merian North American Equity Fund - Merian Global Investors
C’est un fait, les gérants actifs, notamment d’actions américaines, ne se sont pas couverts de gloire. En effet, preuve à l’appui, les gestionnaires actifs sous-performent en général leurs concurrents passifs. Le problème se situe au niveau de l’inconstance du marché américain lui-même. Les gérants de fonds actifs tendent à gérer des portefeuilles concentrés, composés d’actions aux caractéristiques similaires. La sous-performance guette si le marché n’est pas friand d’un tel profil. Une performance constante ne peut venir que d’un portefeuille diversifié, exposé à des styles différents et tirant parti de la capitalisation. Pour nous, le meilleur moyen d’y parvenir est d’appliquer une surveillance systématique de l’évolution de l’environnement de marché et du sentiment des investisseurs, afin d’aboutir à un portefeuille ajustable composé de titres dont les données suggèrent qu’ils sont les plus susceptibles de performer.
→ Les gérants actifs tendent à gérer des fonds concentrés, composés d’actions aux caractéristiques similaires.

Andrew Formica Chief Executive Officer - Jupiter AM
La gestion active rencontre des obstacles qui obligent ses acteurs à rester agiles: les changements de comportement des clients, l’évolution de l’environnement réglementaire et les changements causés par les nouvelles technologies. Nous privilégions une approche de long terme, véritablement active, basée sur de fortes convictions, qui se concentre sur la recherche et l’investissement responsable dans des entreprises durables. Se concentrer sur cet objectif, à savoir écouter nos clients et être vraiment actif, plutôt qu’hyperactif, sera la meilleure voie vers le succès. S’il est important d’innover continuellement, d’envisager et d’adopter de nouvelles technologies pour améliorer les processus de prise de décisions, nous devons aussi garder en tête que la cohérence est l’une de nos plus grandes forces. Plus nous en ferons la démonstration, plus notre futur et celui de nos clients sera meilleur.
→ Ecouter les clients et être vraiment actif, plutôt qu’hyperactif, sera la meilleure voie vers le succès.

Umberto Boccato Head of Investment - Mirabaud AM
La gestion indicielle ne saurait tuer la gestion active. Au contraire, la tendance actuelle de l’allocation de capital aux stratégies indicielles favorise le renouveau des gérants de convictions. L’abandon relatif et récent des fonds actifs au profit des fonds indiciels résulte en un marché moins scruté par les gérants opportunistes, ce qui favorise les inefficiences et donc les sources de rendement. Combiné à une économie en fin de cycle, cela encourage les stratégies d’investissements actives. A l’inverse des gérants indiciels, contraints de suivre les tendances des marchés reflétées dans l’évolution des capitalisations boursières, les gérants actifs peuvent se focaliser de manière dynamique et proactive sur les opportunités que présentent les marchés arrivant à un point d’inflexion. Ils peuvent ainsi séparer le bon grain de l’ivraie et in fine générer de l’alpha par la sélection de titres de qualité dans des marchés et des segments spécifiques.
→ La tendance actuelle de l’allocation de capital aux stratégies indicielles favorise le renouveau des gérants de convictions.